Renault attend toujours le feu vert des autorités de Pékin pour s'implanter... en Chine. Une autorisation qui n'arrive toujours pas. Elle était initialement attendue pour la fin du premier trimestre 2013. Puis Renault l'espérait "avant l'été", comme on nous l'affirmait officieusement en avril dernier, au salon de Shanghai. Maintenant, le constructeur français table sur "avant la fin de l'année".
Le groupe tricolore doit implanter une usine à Wuhan, capitale de la province du Hubei. Cette usine devrait avoir une capacité de 150.000 véhicules par an, moyennant un investissement de 7,2 milliards de yuans (870 millions d'euros), selon un document officiel sur le site du Bureau de protection de l'environnement de la province.
L'allié de Renault en Chine? Dongfeng?
Pour cette usine, Renault s'appuie sur le partenariat noué il y a plusieurs années par Nissan - allié japonais de la firme au losange -... avec Dongfeng. Eh oui! Et qui est Dongfeng? Le grand groupe public chinois qui négocie actuellement avec PSA Peugeot Citroën une alliance stratégique et financière! A l'image de Nissan, Renault a prévu en effet une co-entreprise avec ce même Dongfeng.
"Les chinois sont rompus aux grandes négociations diplomatiques. La partie chinoise peut très bien faire dépendre le feu vert pour l'implantation de Renault en Chine des résultats de la grande négociation entre Dongfeng, PSA et l'Etat français", explique un expert qui connaît bien le groupe chinois.
Un levier dans les mains de la partie chinoise
Chez Renault, on assure certes officiellement ne voir aucun rapport entre le projet de Renault avec Dongfeng en Chine et les discussions actuelles entre le même Dongfeng et PSA pour une entrée au capital de ce dernier. Il n'empêche. "C'est un levier supplémentaire dans les mains des chinois vis-à-vis de l'Etat français", assure l'expert interrogé.
Le projet de la co-entreprise de Renault avec le groupe chinois Dongfeng devrait produire des véhicules de type 4x4 et des modèles multi-usages, selon le document officiel sur le site du Bureau de protection de l'environnement de la province. Des voitures électriques sont aussi à l'étude. Les négociations avait démarré en juin 2011. Le constructeur français a annoncé alors son intention de produire des véhicules à partir 2014 sur place. L'accord avec Dongfeng a été finalement signé l'an dernier.
La fabrication de véhicules dans l'ex-Empire du milieu "débutera avant la fin de 2016", espérait Gilles Normand, responsable de la zone Asie-Pacifique, en avril dernier lors du salon de Shanghai. "On bénéficiera des plates-formes, des moteurs, des boîtes de vitesses, déjà fabriquées par notre partenaire Nissan sur place", soulignait-il.
Des ventes encore dérisoires
Seul grand constructeur à ne pas être implanté industriellement en Chine à ce jour, Renault s'était installé une première fois en 1993 pour y produire des minibus Trafic. Mais, les cadences étaient demeurées dérisoires et l'expérience avait tourné court. Le projet additionnel de fabriquer des Kangoo n'avait pas eu de suite.
A l'heure actuelle, Renault écoule uniquement en Chine des modèles essentiellement importés de sa filiale coréenne Renault Samsung Motors, des 4x4 Koleos en très grande majorité, histoire de se roder, avec une centaine de points de vente. Les ventes de Renault sont évidemment dérisoires et le resteront tant qu'il n'y aura pas de production locale, alors que la Chine est le premier marché du monde.
"La Chine est une nouvelle frontière pour Renault'", expliquait Carlos Ghosn, son PDG, lors de la présentation des résultats financiers du groupe à la mi-février 2013. "La croissance de Renault sera plus forte que celle de Nissan dans les prochaines années grâce (notamment) à la Chine où nous ferons plusieurs de dizaines de milliers de véhicules par an", ajoutait, enthousiaste, le dirigeant. On n'en est pas encore là.
Négociations entre PSA et Dongfeng
En grave crise et en mal d'argent frais, PSA prépare pour sa part une augmentation de capital. L'Etat français et le groupe chinois Dongfeng pourraient investir chacun 1,5 milliard d'euros et prendre chacun une participation de 20% à 30%, selon l'agence Reuters. Le capital de PSA Peugeot Citroën est contrôlé aujourd'hui à 25,2% par la famille fondatrice - qui possède 37,9% des droits de vote - et son allié américain General Motors qui en détient 7% depuis 2012.
Les négociations entre PSA et Dongfeng -son partenaire local depuis les années 90 - durent depuis quelque temps déjà. Le constructeur chinois propose "1,6 milliard de dollars (1,2 milliard d'euros)", assure le China Business News. Une proposition basse. Au cours actuel de l'action, 30% de PSA vaudraient grosso modo 2 milliards d'euros.
Il y a "un certain nombre de réflexions en cours" entre PSA Peugeot Citroën et le groupe automobile chinois Dongfeng, avait déclaré laconiquement fin septembre Philippe Varin, président du directoire de PSA.